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Mais qu'y peut la raison? L'enthousiasme
pour le « climat global » et la prévision apocalyptique
est porté par une sorte de passion contemporaine dont on
ne sait si elle est scientifique ou religieuse, et dans laquelle
s'enracine l'écologisme. L'on doit ici se référer à l'ouvrage
intitulé Gaïa, publié en 1978, et au mythe qui
en a dérivé. « Gaïa », c'est à la
fois une hypothèse scientifique conçue par le chimiste
britannique James Lovelock, et une résurrection du mythe
hellénistique de la Terre Mère.
A suivre Lovelock,
que les écologistes invoquent plus souvent qu'ils ne l'ont
lu (s'ils le lisaient, ils découvriraient avec surprise
qu'il est partisan de l'énergie nucléaire), la Terre,
Gaïa, se comporterait comme un organisme vivant et complet,
susceptible de s'adapter aux stress que les humains lui font subir.
Par un subtil ajustement de ses composantes physicochimiques, Gaïa
conserverait en toutes circonstances des conditions propres au
développement de la vie. Mais, par un retour évident,
quoique non reconnu par ses adeptes, à des cultes païens
antérieurs au judaïsme et au christianisme, les écologistes
retiennent avant tout la puissance métaphorique de cette
figure de Terre Mère. Cultes antérieurs et antinomiques
aux religions monothéistes, puisque le caractère
singulier de celles-ci a été de rompre le lien immémorial
entre l'homme et la nature pour hisser celui-là au-dessus
de celle-ci. À l'opposé, pour les adeptes de Gaïa,
l'homme n'est qu'une espèce parmi d'autres, tributaire de
la nature mais en rien supérieure à elle. C'est sur
fond de cette approche magique que prospère la notion de « climat
global ».
Ce « climat global » fut initialement « simulé » sur
ordinateur à la Nasa par un certain James Hansen, astrophysicien de son état
: n'était-il pas cohérent que la même organisation qui envoie
des satellites et des fusées dans l'espace produise aussi cette notion,
jusque-là ignorée des climatologues qui n'en voyaient pas l'intérêt
ni la valeur scientifique ?
En 1988, après un été particulièrement
chaud aux Etats-Unis, Hansen présenta au Congrès, avec un grand
talent de communicateur, le modèle informatique qui, pour la première
fois, semblait prévoir un réchauffement de la planète en
isolant le rôle de l'effet de serre, puis, à l'intérieur
de celui-ci, la fonction particulièrement néfaste du dioxyde de
carbone, et enfin, dans la production de ce CO2, la part dite anthropique imputable
aux activités humaines.
Le nouveau paradigme était né, historiquement daté ; de
cette matrice dérivent toutes les prédictions ou prophéties
que l'on a entendues et continue d'entendre depuis lors. Toutes sont
fondées
sur des modèles informatiques. Or ce sont eux qui se réchauffent,
et non pas le climat réel ! L'opinion, sur ce point, est systématiquement
bernée, car on laisse croire que le réchauffement est constaté,
alors qu'il n'est qu'anticipé sur ordinateur.
Le réchauffement
du climat est une théorie, ce n'est pas une vérité expérimentale
; il n'existe aucune preuve de ce phénomène et ce n'est pas faute
d'en chercher. Au contraire, la plupart des vérifications concrètes
des températures réelles ne confirment pas les simulations ; elles
ne le pourraient d'ailleurs pas, puisque lesdits modèles annoncent des
chiffres à un siècle de distance, et l'on ne peut mesurer que la
température du moment. Les pourvoyeurs de modèles restent donc
insensibles aux données que leur fournissent les climatologues, les uns
et les autres ne travaillant ni dans le même temps, ni dans le même
champ ; pour les uns, c'est la réalité immédiate tandis
que pour les autres, c'est une lointaine virtualité.
Les climatologues du réel mesurent des températures locales, alors
que les simulateurs de modèles raisonnent en moyennes, qui ne font pas
sens pour les premiers. Ainsi, on constate depuis vingt ans que la
côte
est de l'Islande se réchauffe, tandis que sa côte ouest se refroidit.
L'Islande se réchauffe-t-elle ou se refroidit-elle ?Le modèle
global incite à produire une moyenne que l'on appellera « le temps
qu'il fait en Islande », mais qui ne correspond en rien à l'Islande
réelle.
Autre exemple : depuis
un siècle, la température
a monté de 0,6 degré en Ukraine, tandis qu'elle a baissé de
un degré dans la vallée du Nil ; doit-on tracer une ligne médiane
entre ces deux régions et en conclure que la température au Levant
a augmenté ou baissé en un siècle ?
C'est pourtant ainsi, par des moyennes, que procèdent les simulateurs.
On constatera au passage que ceux-ci ne sont généralement pas des
climatologues, car la climatologie, dérivée de la géographie,
a toujours été considérée dans le milieu universitaire
comme une discipline marginale, moins gratifiante et moins bien dotée
que la géologie, l'astrophysique ou l'océanographie. Par conséquent,
la plupart des observations qui nous sont présentées comme « scientifiques » émanent
en fait de « savants » étrangers à la climatologie.
Pour le public, un savant étant un savant, l'esbroufe passe inaperçue
; alors que pour les véritables climatologues, l'approche globale du climat
par des modèles n'a pas de sens, puisqu'elle ne décrit rien de
réel.
Si l'on reconnaît que la notion de climat n'a de sens que localement, l'important
ne gît pas dans la moyenne, il consiste à déterminer où et
quand se produisent d'éventuelles variations. Si réchauffement
il y a, et là où il y a réchauffement, comme en Ukraine,
déjà citée, il résulte souvent de ce que les hivers
deviennent moins froids (alors même que les étés, eux, ne
deviennent pas plus chauds) ; ce qui ne conduit pas du tout aux mêmes conséquences
qu'un réchauffement d'été, en particulier pour l'agriculture.
Il semble aussi que ce possible réchauffement ait commencé au tout
début du XXe siècle, bien avant la dissémination de l'industrie
et l'essor de l'automobile. Réchauffement possible mais incertain, car
même là où il est avéré, les variations annoncées
des températures sont chiffrées par rapport à des périodes
antérieures où l'on ne mesurait pas la température avec
exactitude, ou pas partout, ou pas de la même manière. Ainsi, celui
qui dit ce que l'on entend répéter que « le Sahel se réchauffe » ne
saurait le démontrer, puisque peu de températures fiables ont été relevées
dans l'hémisphère Sud avant les mesures par satellite effectuées à partir
des années 1970. Au surplus, si le Sahel se réchauffe, c'est qu'il
y pleut moins ; or, la théorie du réchauffement global devrait
en principe accroître la pluviométrie.
Que se passe-t-il donc en réalité, s'il
se passe quelque chose ?
Si l'on se réfère non pas aux travaux de la Nasa, mais à ceux
qui sont publiés en France, en particulier par le laboratoire
de géophysique
climatique de l'université de Lyon, tout aussi légitimes, me semble-t-il,
il ressort que le climat, à terme, ne se réchauffe pas, ne se refroidit
pas, mais que certaines régions refroidissent tandis que d'autres se réchauffent.
Quelles pourraient en être
les causes ?
Parmi les origines probables de ce changement climatique, il
convient de citer en premier lieu l'agitation propre au Soleil
; les variations
du
rayonnement solaire, à quoi s'ajoutent d'infimes fluctuations de l'axe de rotation
de la Terre, suffiraient à expliquer les modifications de température
intervenues depuis des millénaires, telles qu'on peut les repérer
par l'examen des glaciers. Puis suivent, par ordre d'influence décroissante,
les éruptions volcaniques. L'impact sur le climat de ces éruptions
est amplement documenté ; elles conduisent en principe à des refroidissements
locaux, voire à la quasi-disparition de certains étés.
L'éruption
du volcan Pinatubo, en 1991, s'ajoutant à l'activité permanente
du volcan Erebus situé sur le continent Antarctique, permet ainsi d'expliquer
en partie sinon totalement l'altération de la couche d'ozone constatée
l'année suivante et le fameux «trou» qui s'élargit
au-dessus de cette zone. Mais les écologistes de l'époque, alliés
objectifs de la Nasa, qui avait besoin de crédits pour justifier ses recherches,
préférèrent incriminer, plutôt que les volcans, les
gaz industriels : les CFC, utilisés comme réfrigérants de
base dans tous les équipements domestiques.
Le gouvernement américain
de l'époque était d'autant plus disposé à incriminer
ces gaz que la firme américaine Dupont avait sous le coude un produit
de substitution immédiat dont elle détenait le monopole ; c'est
ainsi, pour de bonnes et de mauvaises raisons, que les CFC furent prohibés
sur la planète entière, et remplacés progressivement par
le gaz Dupont, plus onéreux que les CFC. Cette affaire illustre à quel
point la politisation de la question du climat est devenue un enjeu économique
impliquant des intérêts fort concrets ; nous sommes loin d'une science « pure » élaborée
dans des laboratoires pareils à des tours d'ivoire !
Le « trou » dans la couche d'ozone, encore inexpliqué à ce
jour, mais toujours présent pour des raisons qui demeurent tout aussi
mystérieuses, a suscité un émoi qui apparaît rétrospectivement
comme une répétition générale, en format réduit,
de la frousse globale et organisée plus récemment autour de l'effet
de serre. Les volcans embarrassent donc beaucoup les tenants de l'hypothèse
du réchauffement par le CO2, qui voient leurs modèles perturbés
par des bouleversements imprévisibles, bien plus considérables
que ce que produiront jamais nos usines sur des périodes aussi brèves.
Les volcans nous infligent en somme une leçon de modestie, mais les adeptes
de Gaïa ne sont pas modestes : ils sont persuadés que ce sont les
hommes qui font le climat. Ce pourquoi ils privilégient l'importance de
l'effet de serre qui, de fait, dépend de nous mais en partie
seulement.
Admettons néanmoins, comme on nous le répète et comme il
est plausible, que la Terre se réchauffe. Quelles en seraient les conséquences
?
Les hivers devenant moins froids, la période de croissance pour l'agriculture
s'allongerait, en particulier chez les grands producteurs de céréales
comme la Russie ou le Canada ; si, de surcroît, le réchauffement
est bien causé par une augmentation du dioxyde de carbone dans l'atmosphère,
on observera que celui-ci favorise la pousse des plantes dont il constitue l'aliment
principal. La sécurité alimentaire dans le monde en sortirait donc
renforcée. En contrepoint de ces effets positifs que Ton ne mentionne
jamais dans les assemblées politiques, ne doit-on pas redouter une montée
du niveau des océans dont les eaux saliniseraient les sols de pays tropicaux
pauvres comme l'Inde et pourraient engloutir les terres basses au risque de faire
disparaître les Maldives, le Bangladesh et le delta du Mississippi
?
Ah, les Maldives ! Si cet archipel n'existait pas, les écologistes l'auraient
inventé pour démontrer que la montée du niveau des mers
provoqué par le réchauffement du climat engloutirait cette pauvre
nation à fleur d'eau ! Mais que l'on se rassure : même en cas de
réchauffement, le niveau des océans ne varierait que d'une dizaine
de centimètres, selon les prévisions les plus pessimistes ; il
pleuvrait davantage sur les terres arides comme le Sahel, sans entraîner
pour autant une modification substantielle du niveau des mers. Pour que se produise
la catastrophe annoncée par des mouvements écologistes comme Greenpeace,
le plus véhément, il faudrait que les glaciers polaires fondent.
Or, contrairement aux idées reçues sur la fonte des glaces, toutes
les mesures effectuées au pôle Nord depuis vingt ans montrent que
le pôle refroidit : ce qui pourrait conduire, du fait de l'accumulation
des glaces, à une baisse plutôt qu'à une hausse du niveau
des océans.
Mais admettons encore une fois, pour les besoins de la démonstration,
que la Terre se réchauffe et que le niveau des eaux monte. L'agriculture
telle que nous la connaissons serait en effet menacée. Celle-ci est basée
sur une lente adaptation des espèces aux conditions écologiques
; un brusque changement anéantirait en partie l'œuvre de sélection
des espèces vivantes opérée au fil des siècles. Comment
se réadapterait-on à des conditions nouvelles, si le temps vient à nous
manquer? Par chance, les biotechnologies permettraient à l'humanité menacée
de ne pas reprendre à partir de zéro la sélection des espèces,
mais de passer par le « circuit court » des OGM.
Si l'on craint le
réchauffement, il est impératif de soutenir la recherche et l'exploitation
des OGM ; ne pas se rallier aux OGM en
ces circonstances serait suicidaire. D'ailleurs,
par précaution, parce que l'eau vient à manquer dans certaines
régions du globe, ou parce que l'on y redoute les effets du réchauffement,
des biologistes anticipent bien ces risques par la recherche d'OGM adaptés
au changement climatique ; c'est ce que font notamment des chercheurs
chinois et indiens.
En Occident, on sait que, parmi tous les facteurs d'un réchauffement possible,
c'est l'« effet de serre » et lui seul qui cristallise l'attention
; à bon droit, apparemment, puisque, parmi tous ces paramètres,
il est le seul sur lequel on puisse éventuellement agir, en positif ou
en négatif, en réduisant ou augmentant les émissions de
méthane et de dioxyde de carbone.
Rappelons néanmoins que ce dioxyde de carbone, diabolisé, a toujours été là :
c'est lui qui permet la vie et il n'est que modestement dû aux activités
humaines. La quantité totale de dioxyde de carbone produit par la nature
est de l'ordre de 250 milliards de tonnes par an, alors que la production engendrée
par l'homme, y compris par sa respiration, atteint environ
7 milliards de tonnes.
Sommes-nous réellement à l'origine d'une différence qualitative,
alors qu'il s'agit bien du même gaz, et devrions-nous retenir notre respiration
? Dans les controverses et les assemblées politiques sur le sujet, on
ne mentionne que le dioxyde de carbone émis par nos usines et nos automobiles
; le CO2 naturel et non industriel, tout comme le méthane qui, autant
que le CO2, contribue à l'effet de serre, sont rarement incriminés
; la vapeur d'eau qui constitue
les deux tiers de l'effet de serre n'est jamais évoquée.
Le méthane est certes en partie, lui aussi, une conséquence de
l'activité économique, mais il provient également un peu
des fuites des gazoducs russes, et, pour beaucoup, des vaches et des rizières.
Les Russes n'étant pas, contrairement aux Américains, dans le collimateur
des écologistes, on les mentionne peu. Et comment s'en prendre à nos éleveurs
ou aux paysans chinois tout en restant « politiquement corrects » ?
Impossible ! Pourtant, si l'on en croit l'inventeur du
modèle de réchauffement,
James Hansen, le méthane contribuerait deux fois plus à l'effet
de serre que le dioxyde de carbone. Hansen propose d'ailleurs de réduire
l'émission de méthane par les ruminants en modifiant leur régime
alimentaire ; il est peu suivi, son initiative ne suscitant aucun écho
politique.
C'est donc sur « notre » dioxyde de carbone que se concentrent les émotions
et, au-delà, par-dessus tout, sur le système économique
qui l'engendre : l'industrie, le capitalisme, la société de consommation.
Mais le dioxyde de carbone réchauffe-t-il vraiment le climat ? Bien que
ce soit parole d'Evangile pour les écologistes, la preuve n'en est pas
faite. On a seulement constaté qu'il y avait, depuis un siècle,
une coévolution de la température d'un côté et de
la teneur de l'atmosphère en CO2 de l'autre ; or une coïncidence
n'est pas une relation de cause à effet. Le fondement de la pensée
rationnelle depuis le XVIIe siècle est précisément la distinction
entre causalité et coïncidence.
Oublier cette loi nous ramènerait à la
pensée magique ; or c'est exactement la régression à laquelle
nous convient les accusateurs inconditionnels du dioxyde
de carbone dans l'effet de réchauffement. De fait,
la teneur en CO2 augmente parfois avant la température,
mais, parfois, c'est l'inverse qui est noté. Où est
donc la cause, où l'effet ? Et quand le CO2 augmente,
serait-ce nécessairement
néfaste ? Il peut contribuer au réchauffement
du climat, ce n'est pas certain, mais il est en revanche
avéré, nous l'avons rappelé plus
haut, qu'il participe de manière positive à la
croissance de la végétation.
Si l'on recense toutes les données constatées sur ce sujet controversé,
certaines n'étant ici qu'esquissées, et leur mention n'étant
nullement exhaustive, force est de conclure que l'on s'avance entre des hypothèses
fragiles et contradictoires.
Pourquoi, dans ces conditions, faut-il croire au
réchauffement, et au dioxyde de carbone d'origine humaine comme étant
sa cause première ?
Parce qu'il est plus commode d'y croire que de ne
pas y croire ; il est plus confortable de suivre la mode que d'aller à contre-courant.
Cela vaut aussi dans les milieux scientifiques, ainsi que nous l'avons déjà constaté dans
le cas des OGM : il est plus facile d'obtenir des crédits pour des recherches
visant à démontrer le réchauffement que pour celles visant à en
douter. Trois mille chercheurs, dans des disciplines
qui ont trait de près
ou de loin au climat, vivent de cette querelle depuis qu'elle a éclaté. À eux
les crédits, les honneurs des publications scientifiques, la présence
dans les médias ! Naguère enfermés dans d'obscurs laboratoires,
ils vivent enfin leur heure de gloire ; on a beau être savant, on n'en
est pas moins homme...
Tout porte cette communauté internationale à participer à l'effervescence
climatique plutôt qu'à envisager qu'il ne se passe rien ou, plus
probablement, rien sur quoi l'on puisse agir. A eux les colloques, les symposiums
au bout du monde ! A eux, enfin, avec un peu de chance, l'espoir d'un poste dans
une organisation internationale, à Genève, par exemple, où siège
le Comité sur le changement climatique. Encore une fois, n'est-ce pas
l'idéologie, appuyée sur l'intérêt matériel
des savants, qui guide ici la recherche ?
Mais les scientifiques ne sont pas les seuls dont le jugement
risque d'être
influencé par l'intérêt matériel. Il en va de même
pour certains Etats et certaines entreprises. Les pays tropicaux, dotés
d'une vaste couverture végétale, sont, si l'on peut dire, de chauds
partisans de l'effet de serre : leur territoire étant presque entièrement
couvert de forêts, ils voient là l'occasion de commercialiser des « droits à polluer » avec
des pays industriels tels que les États-Unis. La Russie qui, en raison
de son affaissement économique, produit peu de dioxyde de carbone, apprécie
aussi la thèse du réchauffement qui lui permettrait de vendre des « droits à polluer » au
Japon tout en incriminant le capitalisme américain, censé détruire
notre belle planète.
Il se trouve aussi des entreprises capitalistes et transnationales,
productrices de pétrole, pour se rallier paradoxalement à la thèse du
réchauffement : c'est en particulier le cas de Shell et BP. Les associations écologistes
en font évidemment grand cas.
Comment ces diables se sont-ils
métamorphosés
en anges écologiques ?
Par la force des arguments ?
En vérité,
ces ralliements doivent peu à la conviction, et tout à l'intérêt économique
bien compris ; les producteurs de pétrole et de gaz ont flairé la
possibilité, avantageuse pour eux, de remplacer leurs concurrents fournisseurs
de charbon, encore plus incriminés qu'ils ne le sont eux-mêmes,
dans des centrales fonctionnant au fioul ou au gaz, qui «réchauffent» moins
et polluent moins que le charbon. Pareillement, en arrière-plan à ce
débat sur le climat, et autour des « plafonds » sur les émissions
de CO2 que pourrait imposer le protocole sur le climat dit de Kyoto, signé en
1997, des entreprises se créent pour mettre à profit ces nouvelles
réglementations et commercialiser des « droits » à émettre
des gaz.
Toute la controverse autour du réchauffement de la planète se trouve
ainsi encombrée de considérations subjectives et financières
qui en font une bataille de lobbies au moins autant qu'une
querelle scientifique.
Le « réchauffement » et l'effet de serre
servent enfin de prétextes à relancer et servir
la cause de « l'écologisme
profond ». Cette idéologie n'est elle-même
rien d'autre que le vieux procès, rajeuni, du développement économique
occidental.
L'ennemi, dans cette querelle, n'est donc pas
tant l'effet de serre que le capitalisme,
suspecté de détruire la divine Nature, déesse
de substitution à la
Révolution sociale. Le réchauffement de la
planète est devenu
la cause relais des déçus de la Révolution
; pour eux, il faut que le monde coure à sa perte,
que le capitalisme conduise inéluctablement
au malheur de l'humanité, puisque les lendemains
qu'ils annonçaient
ne chantent plus. On constate ainsi que bien des responsables
de la gestion politique de l'effet de serre en France sont
d'anciens marxistes reconvertis dans la défense
de la planète ; faute d'avoir obtenu la chute de
l'économie libérale
par la révolution, ils la préparent par d'autres
méthodes.
Le but reste inchangé, seule l'idéologie
se métamorphose.
Une preuve supplémentaire que derrière l'inquiétude
sur l'effet de serre se dissimulent à peine les vieux
spectres de l'anti-américanisme
et de l'anticapitalisme avait surgi dans les derniers jours
de la conférence
mondiale de La Haye sur le climat, en novembre 2000, qui
a vu s'opposer délégués
américains et européens ; le différend
a rebondi au printemps 2001 quand le président des
Etats-Unis a annoncé qu'il n'avait
nullement l'intention de ratifier le protocole de Kyoto.
Du côté américain,
on avance des propositions concrètes et opérationnelles
que, du côté européen, on rejette avec
d'autant plus de hargne que les représentants des
gouvernements dans ces débats sont des écologistes
français et allemands, lesquels souhaitent l'échec
plutôt
que le compromis, afin que leur combat continue. Les pays
tiers, pauvres, sont relégués au rang de
spectateurs impuissants, exactement comme dans le débat
sur les OGM, et bien qu'ils soient les plus concernés.
En effet, si l'on devait réduire les émissions humaines de CO2
de manière assez substantielle pour que la diminution de l'effet de serre
soit mesurable d'ici environ quarante ans, il faudrait, en raison de l'effet
retard de ces gaz, supprimer jusqu'à 60 % des émissions actuelles.
Les pays développés pourraient plus ou moins se réadapter,
mais une chose est certaine : dans les pays non encore industrialisés,
toute perspective de développement disparaîtrait.
Si l'on admet que c'est bien l'industrie qui réchauffe le climat, comment
choisir entre le développement avec réchauffement et l'absence
de développement sans réchauffement ? C'est bien ainsi que le dilemme
se pose, car il est impensable que les pays pauvres puissent se développer
avec des énergies propres et des industries non polluantes : ils n'en
ont guère les moyens. Pour fuir ce débat
embarrassant, l'accord de Kyoto sur le climat exclut les
pays pauvres de son champ
d'application.
Si bien qu'on ne comprend plus : soit le réchauffement menace la survie
de la planète, soit il ne la menace pas. S'il la menace, il n'existe aucune
raison de ne pas forcer les pauvres à respecter eux aussi « Gaïa ». À défaut,
reste à envisager que la véritable raison d'être du protocole
de Kyoto, fixant des objectifs de réduction des émissions de CO2
aux seuls pays riches, est de les punir d'être trop riches : en somme,
une leçon de morale écologiste plutôt qu'une démarche
scientifique.
On fera observer que si le protocole de Kyoto devait être effectivement
respecté, ses promoteurs admettent que l'effet induit par la réduction
des émissions de gaz industriels serait une diminution de la hausse de
température envisagée par leur modèle de... 0,06 degré !
Un résultat si insignifiant qu'il ne serait pas mesurable. Ce fameux traité relève
donc du rituel de pénitence : l'équivalent de trois Pater infligés
aux pécheurs pollueurs. Avec le risque, cependant, de freiner la production
d'énergie dont dépend la prospérité mondiale. Puisqu'ils
refusent de se laisser piéger par ce dolorisme moralisateur, incantatoire
et anti-économique, quelles alternatives si haïssables le gouvernement
américain et, au-delà, les économistes libéraux présentent-ils
?
La première proposition, déjà appliquée parmi les
entreprises polluantes aux Etats-Unis, consiste à créer un marché mondial
des « droits à émettre » du dioxyde de carbone ; les
entreprises qui seraient susceptibles de réchauffer l'atmosphère
ne pourraient se le permettre qu'à condition d'acquérir des « droits » non
utilisés par d'autres, de manière à favoriser les techniques
non polluantes et à atteindre les objectifs globaux par des compensations
entre pollueurs et non-pollueurs ; cette idée séduit d'autant plus
les pays les plus pauvres qu'ils deviendraient les premiers marchands et bénéficiaires
sur ce marché des « droits ».
Mais nos écologistes
européens ne veulent pas en entendre parler, car la technique proposée
aurait le double tort de ne pas interrompre le développement économique
américain, voire européen, et parce que, de surcroît, l'inspiration
du projet est nettement libérale : elle repose sur le marché,
pas sur des interdictions.
Outre l'anti-américanisme sous-jacent auquel la question
du climat fournit un nouveau prétexte, la querelle
illustre deux approches philosophiques de l'action publique
qui séparent les deux continents de façon
irréductible. Pour les Américains, y compris
pour ceux qui croient à l'effet
de serre et à la nécessité d'agir,
l'important est le résultat,
quitte à y parvenir par des méthodes pragmatiques
déjà expérimentées
et applicables. Du côté européen,
l'édiction d'une
norme réglementaire et l'affirmation d'un principe
théorique et
moral, écologiquement correct, apparaissent comme
plus essentielles que l'efficacité ou le caractère
applicable ou pas de la loi.
Deux philosophies contraires
qui méritent certainement, pour être comprises,
d'être reliées à deux expériences
religieuses. Aux Etats-Unis, la religion, comme la connaissance,
est de tradition expérimentale,
tandis qu'en Europe, surtout dans sa partie catholique,
les principes dogmatiques sont énoncés
d'en haut. Le désir de nous enrégimenter
au nom de l'écologie peut donc être perçu
comme un avatar de la culture hiérarchique propre à la
vieille Europe, une tentative élitaire
pour refonder du pouvoir, des normes, une cléricature
: tout ce que, précisément,
les premiers immigrants américains ont voulu fuir...
Une autre proposition d'origine américaine, systématiquement rejetée
par les Européens, l'est pour des motifs plus idéologiques et moins
rationnels encore : comme les forêts, quand elles sont jeunes, constituent
des « puits » à dioxyde de carbone puisqu'elles l'absorbent
naturellement, le gouvernement américain suggère d'en planter de
manière à réduire la quantité globale de dioxyde
dans l'atmosphère, quitte à en produire ailleurs en maintenant
l'activité industrielle ; en somme, seul le résultat global paraît
important aux yeux des Américains, quels que soient les moyens d'y parvenir.
Planter des arbres conduirait à une réconciliation possible entre
la poursuite du développement et la réduction de l'hypothétique
effet de serre. Mais les écologistes y compris certains écologistes
américains, qui détestent le progrès économique et
le capitalisme beaucoup plus qu'ils n'aiment les arbres, repoussent avec indignation
un projet aussi concret. Le refus européen est d'autant moins justifiable
que la principale contribution spontanée de l'Europe au contrôle
de l'effet de serre provient justement de ses forêts qui ne cessent de
s'étendre au for et à mesure que les surfaces agricoles régressent.
Ce sera même certainement, pour les années à venir, sa seule
contribution concrète, car, nonobstant les discours, aucun effort industriel
particulier n'est dirigé en Europe contre l'effet de serre. Tout se passe
comme si l'on n'y croyait pas vraiment, sauf à usage polémique.
Sur le caractère naturel ou artificiel des forêts, on citera un
extrait d'un remarquable document qui circula à la conférence de
La Haye, en réponse aux projets de « puits de carbone », et
présenté comme émanant d'un mystérieux mouvement
des « peuples indigènes » :
« Notre relation intrinsèque avec Mère Nature nous contraint à nous
opposer à l'inclusion des puits à carbone (c'est-à-dire
des arbres) dans le mécanisme du développement propre, parce que
cela réduirait nos territoires sacrés à de simples prisons à carbone,
ce qui est contraire à notre vision du cosmos et à notre
philosophie de la vie. »
II faut à l'évidence appartenir à une nation prospère, être
profondément indifférent aux peuples pauvres et prôner un
retour au chamanisme préchrétien pour rendre public ce genre de
prose tout en prétendant faire de la science.
Ce « chamanisme vert » n'explique pas à lui seul pourquoi
des chefs d'Etat, non écologistes, laissent croire et feignent de croire
eux aussi que le dioxyde de carbone est la nouvelle figure du diable en ce début
de IIIe millénaire. La réponse réside dans la culture politique
de nos dirigeants, de droite comme de gauche : ils redoutent de ne pas être « politiquement
corrects » ou de laisser échapper une mode.
Hier, les hommes de
droite laissaient entendre qu'ils étaient plus sociaux que la gauche ;
les voici plus « verts » que les Verts ! La contagion atteint bien
entendu la bourgeoisie médiatique en quête de catastrophes à déplorer
ou pronostiquer et de postures avantageuses à prendre.
Une ultime raison plus perverse, de caractère « professionnel »,
si l'on peut dire, conduit les politiques à croire au réchauffement
du globe et à l'effet de serre : la quête d'une nouvelle légitimité d'État.
Comme il est prouvé par l'expérience que moins les Etats interviennent,
mieux les économies se portent, les politiques et plus encore les bureaucrates
manquent de raisons de réglementer, taxer et vouloir faire notre bonheur.
Par chance, voici l'effet de serre ! Il faut y croire et le combattre afin d'incarner
le Bien contre ce nouveau Mal. À ce jeu, les chefs d'État sont
tous complices. Tous ont repéré le « filon » politique à une époque
pauvre en grandes causes. L'écologie leur permet de recouvrer une autorité qu'ils
ont tendance à perdre dans les champs d'intervention classiques des États.
L'exemple le plus remarquable est certainement, aux États-Unis, celui
d'Albert (Al) Gore qui a bâti initialement sa carrière politique
sur l'effet de serre, avec l'appui de la chaîne de télévision
CNN dirigée par un écologiste proclamé, Ted Turner. Ce milliardaire
en lutte contre le réchauffement de la planète est devenu, plus
qu'un parvenu, un bienfaiteur de l'humanité. A son instigation, CNN a
systématisé la politisation de la question du climat, les journalistes
de cette chaîne considérant qu'ils ne doivent pas seulement rapporter
les faits mais se faire les avocats d'une cause sauver la planète que
les démocraties, engluées dans le court terme, ne prendraient pas
suffisamment en considération. Si ce choix est avoué à CNN,
il ne l'est pas en d'autres médias qui suivent le modèle américain
avec l'hypocrisie en prime.
Cette responsabilité que s'arrogent les bourgeoisies d'État, des
médias et des organisations internationales suppose de manière
implicite que la démocratie représentative ne fonctionnerait plus
lorsque l'humanité est menacée d'une catastrophe globale, fût-elle
virtuelle. Ce procès de la démocratie a été théorisé par
le philosophe fondateur de l’écologisme, un Allemand émigré aux États-Unis,
Hans Jonas. Dans son ouvrage intitulé Le Principe de responsabilité (publié en
1980 et gros succès de librairie en Allemagne), Jonas recommandait avec
vigueur qu'un despotisme éclairé « vert » remplaçât
les pouvoirs élus de façon à sauver l'humanité malgré elle. «Un
despote qui devra être éclairé mais brutal », crut-il
bon de me préciser lors d'une conversation que nous eûmes à New
York. Il attendait de ce despote qu'il imposât «une éthique
du renoncement : renoncement à la consommation et à la procréation
afin de sauver la biosphère ». La biosphère, « pas
la nature, soulignait Jonas, car ce dernier terme n'a pas de sens ». « La
Lune est naturelle, mais ne mérite pas d'être sauvée »,
ajoutait-il. Jonas ne s'inquiétait que de la manière de trouver
ce « despote vert ». « Sans doute devrait-on le chercher parmi
les dirigeants des grandes entreprises américaines », suggérait-il.
Autant que Lovelock, Jonas inspire les écologistes et leurs alliés,
même lorsqu'ils ne l'ont pas lu, conformément à une loi de
perméabilité constante des idées dominantes que Keynes,
en son temps, a si bien exprimée : « Les dirigeants politiques, écrivit-il
en conclusion à sa Théorie générale, sont les héritiers
inconscients d'économistes morts depuis longtemps, dont ils appliquent
les idées sans même connaître leur nom. »
Cela vaut
aussi pour la « pensée » écologiste.
On m'objectera que, ne sachant pas au juste quelles seraient
les conséquences
d'un possible réchauffement, mieux vaudrait prendre des précautions
plutôt que de ne rien faire. Bienvenue au «principe de précaution» qui
sublime l'ignorance et ressuscite l'Etat providence, mais veillons à ce
qu'il ne retarde pas la science et ne freine pas le développement des
plus pauvres ! Ainsi, on doit constater à regret que tous les crédits
de recherche en climatologie vont à ceux qui croient au réchauffement,
et non à ceux qui en doutent ; l'idéologie torture la science pour
lui faire avouer ce qu'elle veut entendre, comme au temps de Galilée.
On m'objectera encore que, grâce à la
crainte du réchauffement,
la réglementation contraint les usines et les
automobiles à moins
nous empoisonner l'existence ; c'est assurément
un bénéfice,
mais il reste à démontrer que le même
résultat n'aurait
pas été obtenu à la demande et
sous la pression des consommateurs et des citoyens,
sans la contrainte bureaucratique. Si les constructeurs
automobiles
sont déjà en avance sur les normes qu'on
souhaite leur imposer, c'est parce que le marché les
y incite mieux que la loi.
Ultime ironie dans l'histoire du «réchauffement idéologique » de
la planète : il illustre à merveille les contradictions internes
du raisonnement écologiste et de ceux qui le parodient. Si l'on croit
au réchauffement, il convient en effet de favoriser les solutions techniques
destinées à nous épargner ses conséquences fâcheuses
; il devient en particulier impératif de soutenir l'énergie nucléaire
qui ne produit pas de CO2 et qui, en l'état actuel des connaissances,
est la moins nuisible à l'environnement. Mais
ce sont les mêmes
qui s'inquiètent de l'effet de serre et sont hostiles au nucléaire...
Nous avions déjà noté semblable contradiction au cœur
du raisonnement des écologistes au sujet des OGM. Si, en effet, le climat
devenait véritablement instable, il conviendrait que l'humanité,
pour protéger sa sécurité alimentaire, adoptât en
urgence des espèces transgéniques adaptées à l'écologie
nouvelle.
Comment les mouvements écologistes répliquent-ils à ce type
d'arguments factuels, peu contestables ? Pour nous en tenir au site web de Greenpeace,
modèle indépassable du refus du progrès, il convient de
ne surtout pas entrer dans la discussion : celui qui réfute le réchauffement
de la planète, la nocivité du nucléaire ou des OGM est un
criminel, très probablement payé par une grande compagnie pétrolière
ou agroalimentaire. Que l'on puisse douter parce qu'on s'est informé,
est exclu.
On connaît par cœur cette dialectique qui servit
en son temps aux staliniens : le dissident était par
nécessité un traître
ou un otage de la bourgeoisie. De cette méthode
totalitaire, on n'est pas sorti. Sans doute est-elle
inhérente aux passions politiques ou religieuses.
Religieuses, surtout : ceux qui craignent tant que
nous bouleversions la Nature par le Progrès
rééditent inconsciemment
les paraboles du jardin d'Eden et de la Chute. Nous
vivions jadis dans le bonheur
et l'ignorance avant que le serpent nous apporte la
Connaissance et la Mort
; la science
est
le serpent des Ecritures, la Nature idéalisée
est l'Eden, et le réchauffement
du climat, l'antichambre de l'enfer.
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