Violaine Ballivy
La culture d'organismes génétiquement modifiés
(OGM) atteint un nouveau sommet au Québec. Pour la première
fois cette année, les agriculteurs ont semé plus
de maïs transgénique que de maïs traditionnel
dans leurs champs.
La superficie consacrée à la production de maïs
génétiquement modifié -destiné à la
fabrication de biocarburant et à l'alimentation du bétail-
représente désormais 51% du total de terres québécoises
consacrées aux épis. Un record. Les données
les plus fraîches de Statistique Canada, publiées
fin juin, révèlent un bond de 7% en 2006, et de 24%
depuis trois ans.
Faut-il s'en étonner? «Non, répond Luc Belzile,
agronome responsable des semences à la Fédération
des producteurs de cultures commerciales du Québec (FPCCQ).
C'est important, mais on suit la tendance américaine.» Au
contraire, l'engouement des producteurs québécois
pour le blé d'Inde résistant aux herbicides ou aux
insectes ravageurs est tel que «le pourcentage va continuer
d'augmenter», prédit-il.
Selon lui, c'est la rentabilité du maïs génétiquement
modifié qui séduirait les agriculteurs québécois,
dont les marges bénéficiaires ont chuté depuis
2000. La plante survit mieux aux attaques des insectes nuisibles,
nécessite moins d'entretien et moins de pesticides. «Ça
me coûte plus cher pour acheter les semences, mais au bout
du compte, j'économise», témoigne Christian
Overbeek, président de la FPCCQ.
Les données de Statistique Canada ne permettent pas de
comparer la situation du Québec avec celle de l'ensemble
du pays. Mais la province se démarque nettement de sa voisine
ontarienne, où le pourcentage alloué au maïs
OGM est demeuré stable à 40%. Et de la moyenne mondiale,
qui était trois fois plus faible en 2005.
Dans l'assiette et le portefeuille
Greenpeace Canada s'inquiète de cette progression pour
la qualité de l'assiette des Québécois. Aucun
type de maïs dit «sucré» -le roi des épluchettes-
n'a été approuvé par Ottawa, et les étalages
des épiceries devraient en être exempts.
«Mais il y en aura plus dans la chaîne alimentaire,
affirme Éric Darier, responsable du dossier OGM. Il nourrit
les animaux qui produisent de la viande, des oeufs, du lait...
Et si on n'a pas de preuves que les OGM affectent la santé des
animaux, on n'a pas de preuves qu'ils ne l'affectent pas non plus.»
Cette situation pourrait avoir de lourdes conséquences
commerciales, ajoute Éric Darier. «On se prive de
facto du marché des pays qui ont banni les OGM». Dont
l'Union européenne.
La FPCCQ balaie ces considérations d'un revers de main. «Notre
production est essentiellement destinée au marché local»,
souligne Luc Belzile. Mais l'Union paysanne est plus pessimiste.
Le Japon, qui achète le quart de la production porcine du
Québec, voit sa population se mobiliser massivement contre
les organismes génétiquement modifiés.
«Voudra-t-il toujours de nos porcs, quand il saura qu'ils
sont alimentés avec du maïs génétiquement
modifié? demande Benoît Girouard, porte-parole de
l'organisme. Je dirais que non.»
Le maïs est l'aliment génétiquement modifié le
plus cultivé au Québec, suivi de près par
le soya - 41%- et le canola. Sept autres aliments modifiés
ont reçu l'aval d'Ottawa pour être semés au
Canada. Mais aucun ne l'est au Québec, en raison de problèmes
reliés soit à leur mise en marché, soit au
climat.
Les aliments génétiquements modifiés
Voici la liste des aliments génétiquement modifiés
pouvant être cultivés au Québec :
-Maïs (résistant aux insectes, tolérant aux
herbicides, ou les deux)
-Canola
-Pomme de terre
-Tomate
-Courge
-Soja
-Lin
-Coton
-Betterave à sucre
- Papaye
Source : www.ogm.gouv.qc.ca
|